Options de recherche
Page d’accueil Médias Notes explicatives Recherche et publications Statistiques Politique monétaire L’euro Paiements et marchés Carrières
Suggestions
Trier par

La commission administrative de réexamen (Administrative Board of Review, ABoR) est une instance de la Banque centrale européenne (BCE) qui procède à des réexamens des décisions prudentielles de l’institution. Ces réexamens peuvent être sollicités par toute personne ou entité juridique directement concernée par une décision de la BCE ayant trait à la surveillance prudentielle. Les membres de la commission sont des experts externes indépendants, nommés pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Ce document décrit la procédure de réexamen mise en œuvre par la commission et souligne les principales insuffisances et questions auxquelles elle a été confrontée au cours des dix premières années de son existence, de septembre 2014 à septembre 2024.

1 La procédure de réexamen de la commission

La procédure de réexamen de la commission est encadrée par le règlement instituant le mécanisme de surveillance unique (MSU) (principal texte juridique définissant le rôle de la BCE dans la surveillance prudentielle) et par la décision concernant la mise en place d’une commission administrative de réexamen, ci-après « décision ABoR » (acte juridique de la BCE établissant la commission). Conformément à ces deux documents, les membres de la commission et les deux suppléants doivent agir en toute indépendance et au service de l’intérêt public. La commission doit émettre un avis au plus tard dans les deux mois suivant la réception d’une demande de réexamen, sauf si cette dernière est jugée manifestement irrecevable[1]. La commission étudie la conformité de la décision contestée avec le règlement MSU, sur le fond et la forme. Le conseil de surveillance prudentielle de la BCE étudie alors l’avis de la commission, puis soumet une nouvelle décision au Conseil des gouverneurs de la BCE. Cette nouvelle décision peut abroger la décision contestée, la remplacer par une décision modifiée ou la remplacer par une décision de contenu identique à la décision contestée.

1.1 Qui peut contester une décision auprès de la commission ?

La commission administrative de réexamen a dû traiter un certain nombre de demandes de réexamen déposées par des établissements de crédit, d’autres entités ou des personnes physiques telles que des actionnaires, des dirigeants ou des candidats acquéreurs d’une participation qualifiée dans un établissement de crédit. En vertu de la jurisprudence de la commission et des juridictions de l’Union, un réexamen du retrait de l’agrément bancaire d’un établissement peut être sollicité par son ancien organe de direction[2], mais non par ses actionnaires.

1.2 Confidentialité de la procédure de réexamen de la commission

Conformément à l’article 22, paragraphe 2, de la décision ABoR, la procédure de réexamen de la commission est confidentielle.

Les décisions de la commission ne sont pas rendues publiques, mais des extraits de son argumentation peuvent l’être lors de litiges portés devant les juridictions de l’Union. Les affaires de réexamen et certaines parties des avis de la commission peuvent devenir publiques si la Cour de justice s’y réfère dans une procédure judiciaire ultérieure. La Cour de justice peut tenir compte de l’avis de la commission pour statuer sur le dossier dont elle est saisie.

Les parties requérantes doivent garder à l’esprit que toute seconde décision, adoptée par la BCE à la suite d’un avis de la commission, remplace la décision initiale et que, de manière générale, toute procédure judiciaire entreprise à l’encontre de la décision initiale est susceptible d’être considérée comme irrecevable[3]. Une partie requérante contestant la seconde décision consécutive à un avis de la commission doit se pourvoir auprès de la Cour de Justice pour le réexamen de cette seconde décision. Selon les circonstances spécifiques de l’affaire, une partie requérante peut également avoir un intérêt à contester la décision initiale.

La section 2.11 propose une vue d’ensemble des affaires portées devant la Cour de justice faisant mention d’un réexamen de la commission.

1.3 Comment se déroule une procédure de réexamen de la commission ?

La commission entreprend un réexamen à la demande de toute personne ou entité juridique directement concernée par une décision de la BCE ayant trait à la surveillance prudentielle. Cette demande de réexamen doit contenir les motifs invoqués par la partie requérante pour appuyer l’affirmation selon laquelle la décision contestée de la BCE n’est pas conforme, en forme et/ou en substance, avec le règlement MSU.

En principe, la BCE ne dépose pas de contre-soumission écrite. Lors de l’examen de la décision contestée, la commission peut toutefois consulter le tableau de commentaires joint à l’acte contesté, qui indique les observations formulées par le destinataire de la décision lors de la phase d’audition et la manière dont la BCE les a évaluées[4], afin d’établir ce qui a déjà été traité dans le cadre de la procédure administrative. La commission peut examiner la manière dont la BCE a évalué et répondu aux remarques formulées par la partie requérante dans la phase d’audition préalable à l’adoption de la décision contestée. En effet, la commission bénéficie d’un vaste rayon d’action pour ses réexamens, qui lui permet d’examiner à la fois les motifs invoqués par la partie requérante, tels qu’ils sont énoncés dans la demande de réexamen, et toute violation éventuelle des formes substantielles[5].

Dans de nombreux cas, la commission a considéré qu’une audition était nécessaire pour évaluer équitablement la demande de réexamen. Au cours de cette audition, la partie requérante comme la BCE peuvent présenter leurs arguments, et la commission peut poser des questions. L’audition offre à la partie requérante et à la BCE une possibilité supplémentaire de faire valoir leurs points de vue.

Après avoir étudié attentivement les éléments qui lui ont été soumis, la commission conclut son réexamen par un avis et propose les mesures à prendre au conseil de surveillance prudentielle. Celui-ci doit les prendre en considération, mais reste libre d’en tenir compte, ou non, dans ses recommandations[6].

1.4 Reconnaissance du rôle de la commission administrative de réexamen

L’affaire L-Bank[7] a été la première décision de réexamen ayant mené à un pourvoi en appel. Le Tribunal de l’UE et, en appel, la Cour de Justice ont tenu compte de l’avis de la commission dans leur examen de la validité de la décision prise par la BCE à la suite de cet avis. Les juridictions de l’Union ont établi que, dans la mesure où la décision contestée de la BCE respecte la proposition contenue dans l’avis de la commission, elle constitue un prolongement de cet avis et les explications qu’il contient peuvent être prises en compte pour déterminer si la décision contestée comporte une motivation valide. L’affaire L-Bank a mis en avant le rôle de la commission, qui a ensuite été confirmé lors d’autres affaires. L’arrêt du Tribunal dans l’affaire Arkéa[8], en 2017 en est un exemple : il a été émis à la suite d’un autre avis de la commission, et confirmé par la Cour de justice en 2019.

2 Questions abordées par la commission

Depuis sa création en 2014, la commission administrative de réexamen a été saisie sur de nombreuses décisions de la BCE, portant sur des sujets variés. Parmi les problématiques notables figurent l’importance des établissements de crédit aux fins du MSU, le périmètre de la surveillance sur base consolidée, les manquements aux règles prudentielles (telles que les limites applicables aux grands risques, par exemple), les règles de gouvernance d’entreprise, le pouvoir d’adopter des mesures prudentielles fondées sur le droit national, la conformité aux exigences prudentielles, le retrait d’agrément bancaire, les sanctions administratives (dont l’anonymisation d’une sanction de la BCE), les mesures administratives fixées par le droit national (intérêts de recouvrement), l’acquisition de participations qualifiées, l’utilisation de modèles internes pour calculer les exigences de fonds propres réglementaires[9] et les inspections sur place. La commission a ainsi pu établir sa propre jurisprudence, dont les contours sont définis ci-dessous.

2.1 Motivation des mesures prudentielles

Les avis de la commission administrative de réexamen ont régulièrement souligné le besoin pour la BCE de motiver ses décisions de manière adéquate et compréhensible pour la partie plaignante. La commission a systématiquement précisé dans ses avis que le degré d’exhaustivité des motivations devait être adapté au caractère sensible de la décision adoptée :

« Les mesures discrétionnaires prises par la BCE doivent être cohérentes et proportionnées. Plus les mesures sont intrusives, plus le niveau de motivation requis est élevé[10] ».

La commission a insisté sur le fait que chaque décision de la BCE doit « respecter le modèle d’activité et les spécificités de l’établissement de crédit », et a affirmé que « pour que les décisions prudentielles soient efficaces et considérées comme légitimes, une motivation adéquate doit être fournie », tandis que « la motivation est d’autant plus importante » pour une mesure prudentielle de nature intrusive, et devrait aller « au-delà du simple recours à la loi et expliquer la nécessité prudentielle sous-tendant l’adoption de la décision ».

2.2 Conformité de la mesure au principe de proportionnalité

En lien étroit avec le point précédent, le principe de proportionnalité, qui guide l’action de toutes les institutions de l’Union européenne, joue un rôle primordial dans les avis de la commission. Il a été régulièrement abordé dans les procédures de réexamen. Dans l’un de ses premiers avis, la commission a demandé à la BCE de préciser son argumentation sur la proportionnalité de sa décision, et de traiter spécifiquement l’incidence de la décision revendiquée par la partie requérante.

L’évaluation par la commission de la proportionnalité des mesures de la BCE, lorsqu’elle est contestée par une partie requérante, constitue un défi tout particulièrement dans les situations où la discrétion de la BCE est importante. La commission administrative a considéré que la BCE devait évaluer et expliquer la proportionnalité de ses mesures lorsqu’elle exerce son pouvoir discrétionnaire. Le principe de proportionnalité a également été étudié en lien avec les délais de mise en conformité à une ordonnance ou une demande de la BCE.

Dans une affaire particulière où la législation nationale établissait un montant forfaitaire à prélever sur les établissements de crédit en cas de non-respect des limites applicables aux grands risques, la commission administrative de réexamen a conclu que, lorsqu’elle appliquait cette législation nationale, la BCE ne pouvait se contenter de ces montants forfaitaires, mais était tenue de motiver la manière dont elle avait appliqué le principe de proportionnalité. Le Tribunal a dûment tenu compte de l’avis de la commission administrative de réexamen et a conclu que la BCE s’était fondée sur une prémisse erronée en droit en adoptant une décision constatant que l’imposition d’intérêts de recouvrement revêtait un caractère automatique. Cette prémisse a vicié son examen du caractère proportionné de l’application de la législation nationale en question, dès lors qu’elle l’a conduite à ne pas examiner les circonstances de l’affaire[11]. Le Tribunal a annulé la décision de la BCE.

2.3 Interprétation du corpus réglementaire unique

L’interprétation des règles du corpus réglementaire unique (disponible en anglais uniquement) est une préoccupation récurrente, au même titre que l’exigence de motivation. La commission a parfois souligné une « motivation insuffisante » pour faire remarquer qu’une décision de la BCE était fondée sur une interprétation donnée sans expliquer pourquoi celle-ci avait été retenue et appliquée, en particulier lorsqu’elle s’éloigne de l’orientation officielle des agences réglementaires. La commission a analysé, par exemple, l’interprétation du terme « contrôle joint » par la BCE dans le contexte de l’article 22 de la directive 2013/34/UE sur les déclarations financières annuelles (en cas d’influence ou de contrôle dominant), la consolidation proportionnelle régie par l’article 26 de la directive 2013/34/UE en cas d’entreprises communes et le critère d’« intégrité » dans les orientations communes sur l’évaluation prudentielle des acquisitions et augmentations de participations qualifiées dans le secteur financier[12] adoptées par les autorités européennes de surveillance.

La commission a souvent été confrontée aux orientations de l’Autorité bancaire européenne (ABE), notamment en ce qui concerne les exigences d’honorabilité, de connaissances, de compétences et d’expérience des membres de l’organe de direction d’une banque (EBA/GL/2012/06), le processus de contrôle et d’évaluation prudentiels (SREP) (EBA/GL/2014/13) et le classement d’établissements en tant qu’« autre établissement d’importance systémique » (EBA/GL/2014/10). Les orientations communes évoquées ci-dessus sur l’évaluation prudentielle des acquisitions et augmentations de participations qualifiées (JC/GL/2016/01) ont également figuré aux délibérations de la commission. Les orientations de l’ABE sur l’estimation de la probabilité de défaut, l’estimation de la perte en cas de défaut et le traitement des expositions en défaut (EBA/GL/2017/16) ont joué un rôle dans certaines évaluations de la commission. Enfin, les orientations de l’ABE adoptées en vertu de l’article 396, paragraphe 3, du règlement sur les exigences de fonds propres (EBA/GL/2021/09) ont également été invoquées. Comme toute autorité compétente, la BCE doit respecter les orientations émises par une autorité de réglementation de l’UE, et justifier tout écart par rapport à celles-ci.

2.4 Harmonisation insuffisante du droit national

Les différences entre systèmes de droit nationaux sont un défi pour la BCE et la commission administrative de réexamen. Cet élément a été traité spécifiquement dans le rapport annuel 2015[13] de la BCE, et répété dans le rapport annuel 2016[14]. Le statut du « droit » national peut également soulever des problèmes d’interprétation, par exemple lorsqu’une circulaire ou toute autre méthode informelle de communication d’une autorité nationale pose problème.

2.5 Droits de la défense en cas de retrait d’agrément : position des actionnaires et du conseil d’administration

Comme indiqué ci-dessus, la Cour de justice a décidé que les actionnaires d’une banque ne pouvaient agir pour défendre les intérêts de cette banque (et, indirectement, leurs propres intérêts) en demandant un réexamen. Cette question a été soulevée dans des cas où l’entité concernée se trouvait déjà en cours de liquidation, ou que ses dirigeants avaient été licenciés dans le cadre d’une liquidation ou de la nomination d’un administrateur spécial.

Le retrait de la licence de Trasta a conduit à un réexamen par la commission, et à des procédures judiciaires ultérieures opposant les actionnaires à la BCE et à la Commission européenne. La Cour de justice, annulant une décision antérieure de recevabilité des actionnaires par le Tribunal[13], s’est prononcée conformément à l’approche initiale de la commission[14] pour accepter l’avocat mandaté à l’origine dans sa contestation au nom de la banque, et a rejeté la recevabilité des actionnaires de la banque dans leur contestation du retrait de l’agrément de la banque[15]. Dans le même temps, dans une autre affaire qui n’avait pas été précédée d’un réexamen de la commission administrative, la Cour de justice a souligné que les pouvoirs de représentation résiduels des anciens dirigeants pouvaient ne pas persister dans tous les cas. Dans cette affaire particulière, une personne compétente avait été désignée pour représenter la banque et aucun conflit d’intérêts avéré n’existait pour l’en empêcher ; par conséquent, le tribunal n’a pas reconnu les anciens dirigeants comme représentant la banque[16].

Dans l’affaire Nemea, la commission administrative a reçu une demande de réexamen présentée conjointement par des directeurs de la banque et des actionnaires[17].

Dans une autre affaire concernant également le retrait de l’agrément d’une banque et un réexamen de la commission, le Tribunal a confirmé que les actionnaires n’étaient pas habilités à contester la décision de la BCE[18]. Cette approche est cohérente avec les conclusions quant à l’absence de pouvoir des actionnaires pour contester les décisions de non-résolution du conseil de résolution unique dans les affaires de la banque ABLV[19].

2.6 Évolutions et faits nouveaux

Les évolutions ultérieures à la décision contestée ainsi que l’émergence de faits nouveaux au cours de la procédure de réexamen constituent un important défi. Bien qu’un réexamen administratif doive évaluer la conformité de l’acte juridique avec le cadre juridique en vigueur au moment de l’adoption de la mesure contestée, la commission n’a pas éludé les faits nouveaux survenant au cours de l’audience et n’a négligé aucun changement important dans la situation de la partie requérante. En cas de changement important « sur le terrain », la commission en a tenu compte et a proposé au conseil de surveillance prudentielle d’en tenir compte également.

Lorsque le conseil de surveillance prudentielle reçoit l’avis de la commission, il réexamine l’affaire et est compétent pour prendre en compte toutes les considérations pertinentes, tel que confirmé par le Tribunal dans l’affaire Versobank[20].

2.7 Le droit d’être entendu

La commission administrative de réexamen a établi qu’afin de garantir le droit effectif d’être entendu, le champ d’application complet d’une mesure de surveillance envisagée doit être discuté avec la partie requérante dans un délai raisonnable avant la finalisation d’une décision. À la suite des modifications apportées à la décision ABoR en 2023, il a désormais été explicitement confirmé que la commission peut examiner si le droit d’être entendu a été respecté dans le cadre de la procédure administrative, même lorsque la partie requérante n’a pas invoqué ce motif[21].

2.8 Égalité de traitement

Dans certains cas, la commission a été confrontée à des arguments selon lesquels une décision de la BCE ne respectait pas l’égalité de traitement, cette décision étant susceptible d’avoir une incidence négative pour la partie requérante sur le marché bancaire. Elle a étudié ces demandes sur la base du principe d’égalité et dans le cadre du rôle de la supervision bancaire de la BCE, qui consiste à favoriser la cohérence des normes prudentielles dans la zone euro. Dans de telles situations, la commission a souligné que pour garantir l’égalité de traitement, la BCE devrait exercer ses pouvoirs prudentiels de manière cohérente dans tous les États membres participants, conformément à tous les principes généraux établis par le cadre juridique de l’Union.

2.9 Suspension de la décision contestée

La commission a établi qu’une situation exceptionnelle telle que la pandémie de coronavirus (COVID-19) peut justifier, en tenant compte des intérêts tangibles, la suspension de la mise en œuvre d’une décision prudentielle de la BCE.

2.10 Sanctions

La commission a examiné plusieurs demandes de réexamen de décisions de la BCE imposant des sanctions pécuniaires. En particulier, les parties requérantes ont contesté la proportionnalité des sanctions infligées et le fait que la BCE avait pris en compte toutes les circonstances significatives. Dans une affaire spécifique, la commission administrative de réexamen a estimé que le principe de proportionnalité devait être pris en compte lors de l’application des différents éléments de la méthodologie utilisée par la BCE pour imposer des sanctions administratives, y compris pour déterminer le degré de la faute et la gravité de l’infraction concernée. Cela a conduit la commission à proposer à la BCE de modifier sa décision initiale.

En ce qui concerne la publication des sanctions, la commission a estimé qu’une sanction anonymisée ne peut être justifiée que si sa publication est susceptible d’avoir des conséquences négatives importantes sur la partie requérante. Il a été constaté que la publication anonyme n’était autorisée que dans des situations spécifiques. La publication d’une décision de sanction n’était ni une pénalité en soi ni un élément accessoire de la sanction, mais une exigence imposée par le législateur visant à assurer l’effet dissuasif général d’une sanction par l’information du public. La commission a estimé que l’évaluation de la question de savoir si la publication causerait un préjudice disproportionné à la partie requérante[22] se limiterait à établir les conséquences possibles de la publication. Elle n’est pas revenue sur les éléments précédemment pris en compte pour déterminer la proportionnalité d’une sanction. Enfin, la commission a estimé que la proportionnalité de la décision de publier la sanction serait assurée par les exceptions évoquées à l’article 68, paragraphe 2, de la directive sur les exigences de fonds propres et à l’article 132, paragraphe 1, du règlement-cadre MSU, qui définissent les conditions selon lesquelles l’anonymisation doit avoir lieu. Cette approche a également été adoptée par le Tribunal[23].

2.11 Vue d’ensemble des réexamens de la commission disponibles dans le domaine public

Vous trouverez ci-dessous une vue d’ensemble des affaires de la commission soumises à un nouvel examen par les juridictions de l’Union. Ces affaires ont soulevé plusieurs interrogations : la question, notamment, du retrait d’un agrément bancaire conjointement à celle des pouvoirs des actionnaires dans les affaires Trasta (affaire T-247/16 et affaire T-698/16), Niemelä et autres contre Banque centrale européenne (affaire T-321/17) et Ukrselhosprom PCF LLC et Versobank AS contre Banque centrale européenne (affaire T-351/18 et affaire T-584/18). Les arrêts dans l’affaire L-Bank (affaire C-450/17 P) sur l’importance et dans l’affaire Arkéa (affaire C-152/18 P et affaire C-153/18 P) concernant une décision SREP concluant à l’existence de pouvoirs étendus pour la BCE en vertu de l’article 16 du règlement SSM (affaires T-150/18 et T-345/18) doivent également être évoqués. Les affaires Crédit Agricole (affaires T-133/16 à T-136/16) concernaient le cumul de fonctions exécutives et non exécutives : le Tribunal est arrivé aux mêmes conclusions que la commission tout en suivant un raisonnement distinct, comme le montre cette synthèse (disponible en anglais uniquement). L’imposition de sanctions a été portée devant la cour dans l’affaire VQ contre Banque centrale européenne (affaire T-203/18), et des informations disponibles dans le domaine public sur l’amende montre que l’affaire porte sur Banco Sabadell, pour laquelle la commission avait émis un avis[24]. Les affaires Sberbank (affaires T-647/21 et T-99/22) concernent les règles régissant l’imposition d’intérêts de recouvrement par la BCE, mesure administrative non harmonisée au sens de l’article 65, paragraphe 1, de la directive sur les exigences de fonds propres.

La commission a émis des avis lors de plusieurs affaires pour lesquelles la demande de réexamen ne fait pas référence à un précédent réexamen administratif, ou pour lesquelles la procédure est en cours sans décision judiciaire. Ces avis de la commission ne sont donc pas encore disponibles dans le domaine public.

Tableau 1

Réexamens de la commission disponibles dans le domaine public

Référence de l’affaire

Objet

1

L-Bank (affaires T-122/15 et C-450/17 P)

Importance des établissements de crédit

2

Arkéa (affaires T‑712/15, T-52/16, C-152/18 P et C-153/18 P)

SREP

3

Crédit Agricole (affaires T-133/16, T-134/16 et T-135/16)

Combinaison de fonctions exécutives et non exécutives

4

Trasta (affaires T-247/16, T-698/16 et C-663/17 P, C-665/17 P et C-669/17 P)

Retrait d’agrément en qualité d’établissement de crédit

5

Niemelä et autres (affaire T-321/17)

Retrait d’agrément en qualité d’établissement de crédit

6

BNP Paribas (affaires T-150/18 et T-345/18)

SREP

7

Ukrselhosprom PCF LLC et Versobank AS (affaires T-351/18 et T-584/18)

Retrait d’agrément en qualité d’établissement de crédit

8

VQ (affaire T-203/18)

Sanctions

9

Sberbank (affaires T-647/21 et T-99/22)

Mesures administratives

10

HKB (affaire T-323/22)

Acquisition de participations qualifiées

Au-delà des arrêts des juridictions européennes, la commission retient les thèmes généraux suivants comme sujets de demandes de réexamen :

Tableau 2

Nombre de réexamens réalisés par la Commission administrative de réexamen

Total*

2024*

2023

2022

2021

2020

2019

2018

2017

2016

2015

2014

Avis de la commission finalisés

36

-

3

2

1

2

5**

4

4

6

6

3

Avis proposant de remplacer la décision attaquée par une décision de contenu identique

17

-

3***

-

-

1

1

3

4

1

2

2

Avis proposant de remplacer la décision attaquée par une décision modifiée ou par une meilleure motivation

10

-

-

1

-

-

1

1

-

2

4

1

Avis proposant d'abroger la décision attaquée et de la remplacer par une nouvelle décision

1

-

-

-

-

-

1

-

-

-

-

-

Avis proposant d'abroger la décision attaquée

1

-

-

-

1

-

-

-

-

-

-

-

Avis jugeant la demande irrecevable

7

-

-

1

-

1

2

-

-

3

-

-

Demande retirée

7

-

1

1

-

-

-

1

-

1

2

1

Proposition de suspension émanant de la commission

1

-

-

-

-

1

-

-

-

-

-

-

Source : BCE.
* La date d’arrêté est le 31 août 2024.
** Un avis portait sur deux décisions de la BCE.
*** Dans l’un des trois avis, la commission administrative de réexamen a proposé que le conseil de surveillance prudentielle remplace la décision contestée par une décision établissant les mêmes mesures de surveillance prudentielle.

© Banque centrale européenne 2024

Adresse postale 60640 Francfort-sur-le-Main, Allemagne
Téléphone +49 69 1344 0
Site Internet www.bankingsupervision.europa.eu

Tous droits réservés. Les reproductions à usage éducatif et non commercial sont cependant autorisées en citant la source.

La date d’arrêté des données figurant dans le présent rapport est le 31 août 2024.

Veuillez consulter le glossaire du MSU (uniquement disponible en anglais) pour toute question terminologique.

HTML ISBN 978-92-899-6810-2, doi:10.2866/699256 QB-09-24-609-FR-Q


  1. L’article 11, paragraphe 2, de la décision ABoR stipule que « si la commission administrative estime que la demande de réexamen est manifestement irrecevable, elle peut déclarer la demande de réexamen irrecevable dans un délai de dix jours ouvrés à compter de la réception de la demande de réexamen complète ». Lorsque la demande de réexamen est déclarée irrecevable conformément au paragraphe 2 de l’article 11, il n’est pas adopté d’avis sur le réexamen.

  2. Voir l’arrêt du 5 novembre 2019, Banque centrale européenne contre Trasta Komercbanka et autres, affaires jointes C-663/17 P, C-665/17 P et C-669/17 P, ECLI:EU:C:2019:923. Toutefois, en fonction des circonstances particulières, il est possible que l’ancienne direction de la banque ne représente pas la banque dans le cadre de la contestation du retrait de son agrément, comme stipulé dans l’arrêt du 8 février 2024, Pilatus Bank et autres contre Banque centrale européenne et autres, affaire C-256/22 P, ECLI:EU:C:2024:125.

  3. Cela découle de l’arrêt du 6 octobre 2021, Ukrselhosprom PCF et Versobank contre Banque centrale européenne, affaires jointes T-351/18 et T-584/18, ECLI:EU:T:2021:669, et l’arrêt du 7 septembre 2023, Versobank AS et Ukrselhosprom PCF contre Banque centrale européenne et autres, affaire C-803/21 P, ECLI:EU:C:2023:630, ainsi que de l’ordonnance du 17 novembre 2021, Fursin et autres contre Banque centrale européenne, affaire T-247/16 RENV, et l’ordonnance du 20 décembre 2021, Niemelä et autres contre Banque centrale européenne, affaire T-321/17, ECLI:EU:T:2021:942. Toutefois, il convient de souligner que l’avis de l’avocat général Kokott dans le cadre du pourvoi en cours à l’encontre de l’arrêt rendu dans l’affaire T-321/17 (ECLI:EU:C:2023:935) a conclu que l’intérêt d’une partie requérante à obtenir l’élimination des effets juridiques négatifs immédiats de la décision initiale, à voir la BCE prendre les mesures nécessaires pour se conformer à un arrêt annulant cette décision — conformément à l’article 266, premier paragraphe, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne — et à utiliser cet arrêt comme fondement d’un recours en responsabilité, continuait d’exister même si cette décision initiale avait été remplacée par une seconde décision, consécutive à l’avis de la commission.

  4. Sur le droit à être entendu, cf. également l’article 22 du règlement MSU.

  5. Voir l’article 10, paragraphe 2, de la décision ABoR.

  6. « Le conseil de surveillance tient compte de l’avis de la commission administrative de réexamen » (article 24, paragraphe 7, du règlement MSU) ; « L’évaluation du conseil de surveillance prudentielle ne se limite pas à l’examen des motifs invoqués par la requérante tels qu’exposés dans la demande de réexamen, mais elle peut également tenir compte d’autres éléments dans sa proposition d’un nouveau projet de décision. » (article 17, paragraphe 1, de la décision CAR).

  7. La Cour de justice, dans ses décisions, a statué en faveur de la BCE. La reconnaissance par la Cour de justice de la nature exclusive des pouvoirs prudentiels de la BCE est particulièrement importante : cf. arrêt du 16 mai 2017, Landeskreditbank Baden-Württemberg – Förderbank contre Banque centrale européenne, affaire T-122/15, ECLI:EU:T:2017:337. Cet arrêt a été confirmé en appel par la Cour de justice par l’arrêt du 8 mai 2019, Landeskreditbank Baden-Württemberg – Förderbank contre Banque centrale européenne, affaire C-450/17 P, ECLI:EU:C:2019:372. En outre, dans son jugement du 30 juillet 2019 (2 BvR 1685/14, 2 BvR 2631/14, disponible en allemand et en anglais), la Cour constitutionnelle fédérale allemande a fait une interprétation de l’arrêt de la Cour de justice dans l’affaire L-Bank.

  8. Cf. arrêt du 13 décembre 2017, Crédit mutuel Arkéa contre Banque centrale européenne, affaire T-712/15, ECLI:EU:T:2017:900, arrêt du 13 décembre 2017, Crédit mutuel Arkéa contre Banque centrale européenne, affaire T-52/16, ECLI:EU:T:2017:902 et arrêt du 2 octobre 2019, Crédit mutuel Arkéa contre Banque centrale européenne, affaires jointes C-152/18 P et C-153/18 P, ECLI:EU:C:2019:810. L’arrêt Arkéa porte sur une décision SREP adoptée pour le groupe Crédit Mutuel, dont Arkéa fait partie, en dépit d’un conflit récent entre cette entité et l’organe central du groupe de coopératives de crédit françaises, la Confédération Nationale du Crédit Mutuel (CNCM) ainsi qu’un autre groupe de banques mutualistes (Crédit Mutuel Alliance Fédérale). Cf. compte rendu des arrêts.

  9. Dans le cadre du projet d’examen ciblé des modèles internes (cf. rapport de la BCE, en anglais).

  10. L’approche de la commission à ce sujet a été rendue publique dans le rapport annuel 2017 : en particulier, la commission administrative de réexamen a considéré que plus les mesures imposées étaient intrusives, plus le niveau de motivation requis était élevé.

  11. Arrêt du 28 février 2024, SBER Vermögensverwaltungs AG contre Banque centrale européenne et autres, affaires jointes T-647/21 et T-99/22, ECLI:EU:T:2024:127, paragraphes 44 à 81.

  12. Orientations communes relatives à l’évaluation prudentielle des acquisitions et des augmentations de participations qualifiées dans des entités du secteur financier (JC/GL/2016/01), 20 décembre 2016.

  13. « La commission administrative a observé un manque d’harmonisation dans la mise en œuvre du droit européen au niveau national dans des domaines touchant notamment à la consolidation bancaire ou aux exigences relatives à la qualité des dirigeants. Lors de l’examen des décisions lui ayant été présentées, la commission a noté que, en permettant une large interprétation entre établissements de crédit, ces écarts rendaient difficile un examen cohérent des décisions de la BCE. ». Dans leur contribution jointe, « The Administrative Board of Review of the European Central Bank: Experience After 2 Years » (la commission administrative de réexamen de la Banque centrale européenne : expérience deux ans après, European Business Organization Law Review, disponible en anglais uniquement), publiée en septembre 2017, Concetta Brescia Morra, Andrea Magliari et René Smits affirment également que « la diversité des systèmes de droit nationaux représente un défi majeur pour la commission administrative de réexamen ».

  14. Le rapport annuel 2016 souligne que « le réexamen des décisions de la BCE n’a pas été aisé, en particulier en raison de la fragmentation réglementaire (transpositions diverses du droit de l’UE au niveau national) et de la marge de manœuvre toujours importante liée aux pouvoirs discrétionnaires nationaux ».

  15. Arrêt du 12 septembre 2017, Trasta Komercbanka AS contre Banque centrale européenne, affaire T-247/16, ECLI:EU:T:2017:623 jugeant le recours de Trasta Komercbanka irrecevable et confirmant la demande des actionnaires comme recevable.

  16. Cf. avis de l’avocat général Kokott du 11 avril 2019 dans les affaires jointes C-663/17 P, C-665/17 P et C-669/17 P, ECLI:EU:C:2019:323, points 19 et 74.

  17. Arrêt du 5 novembre 2019, Banque centrale européenne contre Trasta Komercbanka et autres, affaires jointes C-663/17 P, C-665/17 P et C-669/17 P, ECLI:EU:C:2019:923.

  18. Arrêt du 8 février 2024, Pilatus Bank et autres contre Banque centrale européenne et autres, affaire C-256/22 P, ECLI:EU:C:2024:125, paragraphes 34 à 73.

  19. Cf. ordonnance du 20 décembre 2021, Niemelä et autres contre Banque centrale européenne, affaire T-321/17, ECLI:EU:T:2021:942, pourvoi en cours (affaire C-181/22 P).

  20. Arrêt du 6 octobre 2021, Ukrselhosprom PCF et Versobank contre Banque centrale européenne, affaires jointes T-351/18 et T-584/18, ECLI:EU:T:2021:669 et arrêt du 7 septembre 2023, Versobank AS et Ukrselhosprom PCF contre Banque centrale européenne et autres, affaire C-803/21 P, ECLI:EU:C:2023:630.

  21. Ordonnance du 14 mai 2020, Bernis et autres contre Conseil de résolution unique, affaire T-282/18, ECLI:EU:T:2020:209, arrêt du 24 février 2022, Bernis et autres contre Conseil de résolution unique, affaire C-364/20 P, ECLI:EU:C:2022:115, et arrêt du 6 juillet 2022, ABLV Bank contre Conseil de résolution unique, affaire T-280/18, ECLI:EU:T:2022:429, pourvoi en cours (affaire C-602/22 P).

  22. Arrêt du 6 octobre 2021, Ukrselhosprom PCF LLC et Versobank AS contre Banque centrale européenne, affaires jointes T-351/18 et T-584/18, ECLI:EU:T:2021:669, paragraphe 79.

  23. Voir l’article 10, paragraphe 2, de la décision ABoR.

  24. Par dommage disproportionné pour la partie requérante, on entend un dommage qui va au-delà d’une incidence négative sur la réputation de l’entité supervisée et sur sa situation sur le marché, ce que l’injonction juridique de publication accepte comme conséquence de la publication de la sanction pour le manquement à une règle prudentielle.

  25. Arrêt du 8 juillet 2020, VQ contre Banque centrale européenne, affaire T-203/18, ECLI:EU:T:2020:313, paragraphes 69 à 99.

  26. Arrêt du 8 juillet 2020, VQ contre Banque centrale européenne, affaire T-203/18, ECLI:EU:T:2020:313, paragraphes 7 et 8.

Lancement d’alerte