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Document 52018AB0037

Avis de la Banque centrale européenne du 22 août 2018 sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’émission d’obligations garanties et la surveillance publique des obligations garanties et modifiant la directive 2009/65/CE et la directive 2014/59/UE; et sur une proposition du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 en ce qui concerne les expositions sous forme d’obligations garanties (CON/2018/37)

OJ C 382, 23.10.2018, p. 2–6 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

23.10.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 382/2


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

du 22 août 2018

sur une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’émission d’obligations garanties et la surveillance publique des obligations garanties et modifiant la directive 2009/65/CE et la directive 2014/59/UE; et sur une proposition du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 en ce qui concerne les expositions sous forme d’obligations garanties

(CON/2018/37)

(2018/C 382/03)

Introduction et fondement juridique

Le 28 mars 2018 et le 13 avril 2018, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu des demandes de consultation respectivement de la part du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen portant sur: 1) une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’émission d’obligations garanties et la surveillance publique des obligations garanties et modifiant la directive 2009/65/CE et la directive 2014/59/UE (1) (ci-après la «directive proposée»); et 2) une proposition du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 575/2013 en ce qui concerne les expositions sous forme d’obligations garanties (2) (ci-après le «règlement proposé» et ci-après dénommé, collectivement avec la directive proposée, «les directive et règlement proposés»).

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, étant donné que les directive et règlement proposés contiennent des dispositions ayant une incidence sur: 1) la mission fondamentale du Système européen de banques centrales (SEBC) consistant à définir et mettre en œuvre la politique monétaire en vertu de l’article 127, paragraphe 2, du traité, 2) la contribution du SEBC à la bonne conduite des politiques menées par les autorités compétentes en ce qui concerne la surveillance prudentielle des établissements de crédit et la stabilité du système financier en vertu de l’article 127, paragraphe 5, du traité, et 3) les missions confiées à la BCE ayant trait à la surveillance prudentielle des établissements de crédit en vertu de l’article 127, paragraphe 6, du traité. Conformément à la première phrase de l’article 17, paragraphe 5, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

Observations générales

La BCE se félicite des objectifs des directive et règlement proposés, consistant à favoriser la poursuite de l’intégration des marchés financiers de l’Union et à approfondir l’union des marchés des capitaux (UMC). La BCE est favorable à un marché développé, harmonisé, de haute qualité et transparent des obligations garanties (ci-après «obligations sécurisées») dans l’Union et considère la directive proposée comme une étape importante vers la création d’un tel marché. La BCE estime également utile que la directive proposée serve de base à une nouvelle législation nationale sur les obligations sécurisées. Cependant, la mise en œuvre de la directive proposée pourrait ne pas conduire à une harmonisation complète dans la mesure où les États membres disposeront d’une certaine souplesse dans sa mise en œuvre. Ce degré de souplesse ne devrait pas compromettre l’objectif d’une convergence accrue vers une norme commune élevée dans tous les États membres.

Dans le cadre des initiatives lancées au titre des objectifs politiques plus larges de l’UMC, la distinction opérée entre différentes réglementations applicables aux produits permet de tenir compte d’aspects propres aux produits. Dans ce contexte, la BCE soutient l’approche suivie par la directive proposée, selon laquelle les billets garantis européens feraient l’objet d’une proposition législative distincte. Cette approche respecte la spécificité des actifs composant les paniers de couverture des obligations sécurisées européennes, à savoir leur qualité élevée, et ne mélange pas inutilement différentes classes d’actifs.

La directive proposée prévoit la surveillance prudentielle des obligations sécurisées par les autorités nationales compétentes. Cette supervision prudentielle des produits se distingue des missions de surveillance prudentielle de la BCE prévues par le règlement (UE) no 1024/2013 du Conseil (3), sans préjudice de celles-ci. En particulier, la directive proposée n’a aucune incidence sur la mission exclusive de la BCE consistant à agréer les établissements de crédit et à retirer les agréments des établissements de crédit (4), qui peut, selon le cadre juridique national, inclure l’autorisation générale d’émettre des obligations sécurisées. De même, la BCE reste compétente pour veiller à ce que les risques prudentiels découlant des émissions d’obligations sécurisées ainsi que des investissements en obligations sécurisées soient gérés et évalués de manière adéquate par les établissements de crédit.

L’Eurosystème accepte les obligations sécurisées qui remplissent les critères d’éligibilité des garanties des opérations de politique monétaire de l’Eurosystème. L’Eurosystème achète des obligations sécurisées dans le cadre de son programme d’achat d’obligations sécurisées (CBPP3), qui fait partie de son programme étendu d’achat d’actifs (asset purchase programme — APP) (5). Les directive et règlement proposés sont indépendants du dispositif de garanties de l’Eurosystème et du CBPP3, du fait que ceux-ci sont des instruments de la politique monétaire relevant de la compétence exclusive de l’Eurosystème.

Observations particulières sur la directive proposée

1.   Définitions

La BCE suggère d’ajouter l’expression «surnantissement volontaire» comme un élément supplémentaire du surnantissement, soumettant ainsi le surnantissement volontaire à des exigences de ségrégation. Cet ajout permettrait de s’assurer que le surnantissement volontaire est soumis aux mesures de sauvegarde prévues par la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil (6).

2.   Les actifs éligibles

2.1.

La BCE est favorable aux exigences qualitatives applicables aux actifs éligibles par lesquels doivent être garanties les obligations sécurisées, qui comprennent à la fois certains actifs de qualité prédéfinis (7) et «d’autres actifs de qualité» remplissant des exigences précises. Cependant, s’agissant de ces «autres actifs de qualité», il est possible que les exigences correspondantes ne suffisent pas à garantir le traitement harmonisé de ces actifs en tant qu’actifs de qualité, compte tenu de l’approche fondée sur des principes utilisée dans la directive proposée. Par conséquent, la BCE se prononce en faveur de l’introduction d’exigences plus strictes dans la directive proposée.

2.2.

Concernant l’éligibilité des actifs situés en dehors de l’Union, il convient de prévoir une quote-part maximale pour ces actifs afin d’assurer l’homogénéité du panier de couverture, de favoriser le caractère européen des obligations sécurisées et de favoriser la compréhension, par les investisseurs, des risques du panier de couverture.

2.3.

Des obligations sécurisées transparentes et de qualité se caractérisent essentiellement par l’homogénéité des actifs du panier de couverture, de sorte qu’il est préférable de disposer de paniers homogènes composés d’une seule classe d’actifs. Cependant, les États membres peuvent autoriser des paniers mixtes à condition qu’ils spécifient les mesures de sauvegarde nécessaires pour garantir que le profil de risque des actifs d’un panier est d’une nature suffisamment homogène et que la composition du panier de couverture ne change pas de manière substantielle au cours du temps.

2.4.

La directive proposée devrait préciser que l’exigence de ségrégation s’applique à tous les actifs, y compris les actifs détenus au moyen d’un surnantissement, même lorsque ce surnantissement est constitué volontairement. Cette exigence ne devrait toutefois pas s’étendre aux autres garanties supplémentaires relatives aux programmes d’obligations sécurisées qui sont requises par les dispositions législatives nationales applicables aux obligations sécurisées, mais qui ne font pas partie du surnantissement en soi (8). La directive proposée devrait également préciser qu’il convient de séparer les actifs du panier de couverture soit: a) en les enregistrant dans un registre prévu à cet effet; soit b) en les transférant dans une entité ad hoc; soit c) en les détenant au sein d’un établissement de crédit hypothécaire spécialisé.

2.5.

Il convient de compléter la surveillance prudentielle des émetteurs d’obligations sécurisées par un contrôle constant du panier de couverture. La directive proposée devrait rendre obligatoire, et non simplement facultative, la désignation d’un organisme de contrôle du panier de couverture. Cette obligation de disposer d’un organisme de contrôle du panier de couverture est déjà bien établie dans la législation nationale de nombreux États membres. Un tel organisme devrait au moins satisfaire aux exigences minimales prévues dans la directive proposée. L’exigence selon laquelle l’organisme de contrôle du panier de couverture doit être une entité distincte et indépendante de l’établissement de crédit émetteur d’obligations sécurisées, ainsi qu’une entité distincte et indépendante du contrôleur de ce dernier, résout tout conflit d’intérêts potentiel.

2.6.

La BCE accueille favorablement plusieurs dispositions de la proposition de directive concernant l’information de l’investisseur. Premièrement, des informations doivent être fournies à l’investisseur pour toutes les obligations sécurisées règlementées. Deuxièmement, la fréquence de communication des informations à l’investisseur a été accrue, passant de semestrielle à trimestrielle. Troisièmement, la portée des informations à communiquer à l’investisseur a été étendue pour couvrir également les niveaux de surnantissement contractuel et volontaire de même que les risques liés aux taux d’intérêt, le risque monétaire, le risque de crédit, le risque de marché et le risque de liquidité, présentés de façon détaillée. Cependant, ces dispositions laissent une marge excessive aux émetteurs et aux autorités compétentes pour interpréter ces exigences. La possibilité d’adopter une approche différente, par exemple en ce qui concerne les définitions et les formats de données, pourrait compromettre une interprétation commune des informations communiquées. Par conséquent, afin de faciliter encore l’exercice de leur diligence raisonnable par les investisseurs ainsi que la comparabilité des obligations sécurisées, il convient d’exiger des informations supplémentaires et plus détaillées. En outre, les informations devraient être présentées à l’aide d’un modèle.

3.   Exigences en matière de couverture et de liquidités

3.1.

Bien qu’une évaluation commune des exigences en matière de couverture, selon laquelle le calcul est effectué selon le principe du nominal, facilite la comparaison des obligations sécurisées parmi les États membres et les émetteurs, elle n’est pas applicable aux contrats dérivés. Le surnantissement légal devrait être supprimé des exigences en matière de couverture, étant donné qu’il vise à garantir la fourniture d’actifs supplémentaires et qu’il est donc déjà pris en considération dans d’autres dispositions de la directive proposée. Il convient d’exclure du calcul de la couverture non seulement les créances non garanties, mais également les créances garanties dont le débiteur ne pourra probablement pas s’acquitter ou dont le paiement n’a pas été honoré (9), étant donné que, dans de tels cas, le mécanisme du double recours serait affaibli. Un certain nombre de critères supplémentaires est nécessaire pour assurer la protection des investisseurs. Premièrement, il convient d’appliquer au calcul de la couverture minimale les mêmes limites du ratio prêt/valeur que celles fixées par le règlement (UE) no 575/2013 (10). À cet égard, il convient de garantir l’harmonisation du calcul du ratio prêt/valeur en recourant à une indexation transparente, au moins en procédant à une réévaluation annuelle des actifs de couverture et en utilisant le solde actuel du prêt au lieu du solde initial du prêt. Deuxièmement, il convient de ne pas prendre en compte les actifs de substitution dans les exigences en matière de couverture, ou il serait tout au moins prudent d’imposer une limite pour les actifs de substitution à prendre en considération dans le calcul des exigences en matière de couverture.

3.2.

Les actifs de niveau 1 ou de niveau 2 A (11) sont considérés comme des actifs liquides et peuvent donc convenir au coussin de liquidité du panier de couverture. Les actifs de niveau 2B qui comprennent, par exemple, les titres adossés à des actifs, les titres de dettes d’entreprises et les actions remplissant des exigences spécifiques (12), sont moins liquides et ne devraient donc pas faire partie du coussin de liquidité du panier de couverture. Par ailleurs, les actifs émis par l’établissement de crédit lui-même, par son entreprise mère, par sa filiale ou une autre filiale de son entreprise mère ou par une entité de titrisation avec laquelle il a des liens étroits (13), ne devraient pas être utilisés comme éléments du coussin de liquidité, afin d’empêcher une concentration de sociétés du groupe de l’émetteur ou d’entités affiliées à l’émetteur. En outre, il convient que les États membres garantissent un niveau suffisant de diversification (14) pour permettre une liquidation rapide de ces actifs sans perte significative de valeur.

3.3.

Le coussin de liquidité du panier de couverture devrait couvrir l’ensemble des sorties nettes de trésorerie pendant 180 jours calendaires, étant donné que les coussins de liquidité devraient également couvrir les scénarios potentiels d’insolvabilité de l’émetteur. Dès lors, l’application de cette exigence ne devrait pas être écartée, comme cela est actuellement le cas en vertu de l’article 16, paragraphe 4, de la directive proposée, qui n’exige pas de coussin de liquidité dans le panier de couverture lorsque d’autres exigences de liquidité sont prévues dans d’autres actes du droit de l’Union. Cependant, la BCE est consciente qu’il serait nécessaire de préciser, à ce sujet, l’exigence actuelle selon laquelle, pour pouvoir entrer dans la composition du coussin de liquidité d’un établissement de crédit, les actifs ne doivent pas être grevés (15).

3.4.

S’agissant de l’exigence d’un coussin de liquidité dans le panier de couverture, la directive proposée permettrait de calculer le remboursement du principal, pour les obligations sécurisées avec des structures d’échéance prorogeables, en fonction de la date d’échéance finale prorogée au lieu de la date d’échéance prévue. De fait, cela signifie que pour ce type d’obligations sécurisées, aucune exigence de coussin de liquidité n’est imposée pour le remboursement du principal à la date d’échéance prévue. Or, pour le calcul du remboursement du principal des obligations sécurisées avec des structures d’échéance prorogeables, l’exigence d’un coussin de liquidité dans le panier de couverture, devrait se fonder sur la date d’échéance prévue, étant donné que l’on s’attend à ce que ces obligations sécurisées soient remboursées à la date d’échéance prévue et qu’un défaut de paiement à cette date peut entraîner d’importants risques de financement pour l’établissement de crédit. L’échéance de ces obligations sécurisées ne devrait normalement pas être prorogée s’il existe des fonds suffisants pour payer les détenteurs d’obligations sécurisées à l’échéance prévue. Par conséquent, l’absence d’un coussin de liquidité pour le remboursement du principal à la date d’échéance prévue peut accroître la probabilité que l’échéance de ces obligations sécurisées soit prorogée (16).

4.   Structures à remboursement in fine souple (soft bullet) et structures avec transfert direct des flux (pass-through) conditionnelles

4.1.

Des structures innovantes d’obligations sécurisées se sont rapidement développées, nécessitant leur évaluation continue et prudente afin de garantir une croissance durable du marché. En particulier, au cours des dernières années, on constate une plus grande utilisation des obligations sécurisées avec des structures d’échéance prorogeables, qui permettent à l’établissement de crédit émetteur de proroger la date d’échéance prévue des obligations sécurisées, alors que les risques particuliers présentés par ces structures n’ont peut-être pas été suffisamment pris en considération (17).

4.2.

La directive proposée permet des structures d’échéance prorogeables à certaines conditions. Selon l’expérience de la BCE, il n’est pas possible d’exclure totalement le déclenchement d’une prorogation d’échéance de façon discrétionnaire dans tous les États membres, en raison des divergences des cadres juridiques nationaux en matière d’obligations sécurisées, des variations possibles au sein des dispositions contractuelles d’un programme d’obligations sécurisées ainsi que des différences de traitement, en droit national, des défaillances et défauts de paiement lorsqu’un déclenchement volontaire en cas de défaut n’est pas interdit. En permettant de définir contractuellement les conditions de déclenchement de la prorogation, la directive proposée pourrait se traduire par une hétérogénéité importante des obligations sécurisées, ce qui ferait obstacle à l’harmonisation. Il est donc suggéré que seules les conditions de déclenchement légales soient autorisées et que les conditions de déclenchement contractuelles soient exclues.

4.3.

À cet égard, il convient de noter que l’Autorité bancaire européenne (ABE) a proposé un ensemble de conditions précises que les obligations sécurisées avec des structures d’échéance prorogeables devraient remplir afin de bénéficier d’un traitement préférentiel dans la pondération des risques. En particulier, l’échéance ne peut être prorogée que si les conditions de déclenchement suivantes sont réunies (les deux conditions de déclenchement doivent se produire cumulativement): i) l’émetteur des obligations sécurisées doit avoir fait défaut et ii) l’obligation sécurisée ne satisfait pas à certains critères/tests prédéfinis, ce qui semble indiquer que l’obligation sécurisée ne sera probablement pas remboursée à la date d’échéance prévue (18). Ces deux conditions limiteraient l’éventuelle liberté d’appréciation de l’établissement de crédit émetteur concernant la prorogation d’échéance.

5.   Coopération efficace entre les autorités de surveillance

Compte tenu de la compétence de la BCE en matière de risques prudentiels des établissements de crédit, celle-ci doit s’assurer que les risques découlant des émissions d’obligations sécurisées sont gérés de manière adéquate. Par conséquent, la BCE devrait être en mesure de demander aux autorités chargées de la surveillance publique des obligations sécurisées de lui fournir de façon ad hoc des informations pertinentes, dont elle pourrait tenir compte pour la surveillance prudentielle continue de l’établissement de crédit concerné.

6.   Labélisation

Bien que le concept d’un label spécifique pour les obligations sécurisées émises par des établissements de crédit établis dans l’Union présente des avantages, il reste à clarifier certains points au niveau des États membres, tels que l’identité de l’autorité qui sera chargée d’octroyer le label ainsi que les conditions précises de cet octroi. On ne peut totalement exclure l’éventualité que certains investisseurs confondent l’abréviation anglaise du label devant désigner une «obligation sécurisée européenne» (European Cover Bond,) à savoir «ECB», avec l’abréviation anglaise de la Banque centrale européenne (ECB). Par conséquent, un nom plus neutre, par exemple EU Covered Bond («obligation sécurisée de l’Union européenne») serait peut-être préférable.

Observations spécifiques concernant le règlement proposé

7.   Surnantissement et actifs de substitution

7.1.

La BCE accueille favorablement une approche harmonisée en matière de surnantissement minimal. Une méthode de calcul uniforme sans exception est privilégiée. La BCE émet dès lors des réserves quant à la proposition d’appliquer des exigences différentes dans certaines situations. Malgré les défis posés par la fixation d’une exigence commune dans l’ensemble de l’Union, la BCE prend note des récentes normes du Comité de Bâle (19) et considère une exigence de 5 % comme une position raisonnable.

7.2.

La BCE se félicite de la précision, apportée dans le règlement proposé, selon laquelle il convient que les limites du ratio prêt/valeur soient appliquées comme des limites de couverture souples. Ainsi, s’il n’y a pas de limites à la taille d’un prêt sous-jacent, celui-ci ne peut être utilisé pour contribuer aux exigences de couverture que dans les limites du ratio prêt/valeur applicable. Cette limite du ratio prêt/valeur devrait non seulement être appliquée lors de l’inclusion dudit prêt, mais aussi pendant toute la durée de ce dernier. À cet égard, il convient que la ségrégation des actifs du panier de couverture prévue par la directive proposée porte sur le montant total du prêt, y compris la partie du prêt qui dépasse la limite du ratio prêt/valeur applicable. Aux fins des limites du ratio prêt/valeur, il serait prudent que la valeur des biens immobiliers soit suivie et mise à jour au moins une fois par an en utilisant une méthode d’indexation, en plus de l’application des autres exigences relatives aux sûretés réelles immobilières prévues à l’article 208 du règlement (UE) no 575/2013.

7.3.

Compte tenu des difficultés de financement du transport maritime, liées à la nature hautement cyclique du secteur du transport maritime (20), il serait judicieux d’exclure du traitement préférentiel prévu par l’article 129, paragraphes 4 et 5, du règlement (UE) no 575/2013, les obligations sécurisées dont la garantie est constituée de prêts garantis par des privilèges maritimes sur des navires.

7.4.

Il serait prudent que les actifs susceptibles de faire partie du surnantissement obligatoire soient constitués d’actifs éligibles dont la liste figure dans le règlement proposé et soient soumis aux mêmes limites de taille d’exposition que celles prévues dans le règlement proposé.

7.5.

Il est important de fixer des exigences qualitatives pour les actifs de substitution utilisables pour les obligations sécurisées, et il est souhaitable d’appliquer à ces actifs les mêmes exigences qu’aux actifs éligibles, conformément au règlement proposé. Toutefois, il convient de compléter ces critères qualitatifs par une limitation quantitative (21). Celle-ci réglementerait davantage la composition du panier de couverture, afin de garantir son homogénéité, et faciliterait, pour les investisseurs, l’exercice de leur diligence raisonnable. Selon l’analyse de l’ABE, une grande partie des cadres nationaux applicables aux obligations sécurisées règlemente les actifs de substitution du point de vue de la composition et des limites quantitatives (22). Dès lors, la BCE recommande d’inclure dans le règlement proposé une exigence selon laquelle les actifs de substitution ne doivent pas dépasser 20 % de l’encours nominal total de l’ensemble des obligations sécurisées de l’émetteur.

Lorsque la BCE recommande de modifier les directive et règlement proposés, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’une explication, figurent dans un document de travail technique séparé. Le document de travail technique est disponible en anglais sur le site internet de la BCE.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 22 août 2018.

Le président de la BCE

Mario DRAGHI


(1)  COM(2018) 94 final.

(2)  COM(2018) 93 final.

(3)  Règlement (UE) no 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO L 287 du 29.10.2013, p. 63).

(4)  Voir article 4, paragraphe 1, point a), du règlement (UE) no 1024/2013.

(5)  Décision BCE/2014/40 de la Banque centrale européenne du 15 octobre 2014 relative à la mise en œuvre du troisième programme d’achat d’obligations sécurisées (JO L 335 du 22.11.2014, p. 22).

(6)  Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO L 173 du 12.6.2014, p. 190). Voir notamment l’article 76, paragraphe 2, point e), et l’article 79, paragraphe 1, point a), qui exigent que les États-membres veillent à ce que les mécanismes d’obligations sécurisées fassent l’objet d’une protection appropriée afin d’empêcher, entre autres, le transfert d’une partie, mais non de la totalité, des actifs, droits et engagements qui constituent tout ou partie d’un mécanisme d’obligations sécurisées auquel l’établissement soumis à une procédure résolution est partie. Voir également p. 141 de «EBA Report on Covered Bonds: Recommendations on harmonisation of covered bond frameworks in the EU of 20 December 2016 (EBA-Op-2016-23)» [rapport de l’ABE du 20 décembre 2016 sur les obligations sécurisées: recommandations concernant l’harmonisation des cadres d’obligations sécurisées dans l’Union européenne (EBA-Op-2016-23)] (ci-après la «recommandation de l’ABE»).

(7)  Voir article 129, paragraphe 1, points a) à g), du règlement (UE) no 575/2013.

(8)  Par exemple, dans le cas des obligations sécurisées espagnoles (cédulas), l’ensemble du portefeuille hypothécaire constitue une garantie supplémentaire par rapport au niveau requis de surnantissement. La garantie supplémentaire évolue au cours le temps.

(9)  Voir article 178 du règlement (UE) no 575/2013.

(10)  Voir article 129, paragraphe 1, du règlement (UE) no 575/2013.

(11)  Voir articles 10 et 11 du règlement délégué (UE) 2015/61 de la Commission du 10 octobre 2014 complétant le règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne l’exigence de couverture des besoins de liquidité pour les établissements de crédit (JO L 11 du 17.1.2015, p. 1).

(12)  Voir article 12 du règlement délégué (UE) 2015/61.

(13)  Voir article 7, paragraphe 3, du règlement délégué (UE) 2015/61.

(14)  Voir article 8, paragraphe 1, du règlement délégué (UE) 2015/61.

(15)  Voir article 7, paragraphe 2, du règlement délégué (UE) 2015/61.

(16)  Voir également le point 2.2.4 de l’avis CON/2017/46. Tous les avis de la BCE sont publiés sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante: www.ecb.europa.eu

(17)  Voir également les p. 17 et 18 de l’article «ECB contribution to the European Commission’s consultation on Capital Markets Union mid-term review 2017» (Contribution de la BCE à la consultation de 2017 de la Commission européenne sur l’examen à mi-parcours de l’Union des marchés des capitaux) disponible sur le site de la BCE.

(18)  Voir p. 137 de la recommandation de l’ABE.

(19)  Voir «Bâle III: finalisation des réformes de l’après-crise», disponible sur le site internet de la Banque des règlements internationaux, à l’adresse www.bis.org, prenant en considération une exigence de 10 %.

(20)  Voir «ECB Banking Supervision reviews lending to troubled shipping sector» (La supervision bancaire de la BCE examine les prêts au secteur du transport maritime en difficulté), disponible sur le site de supervision bancaire de la BCE à l’adresse suivante: www.bankingsupervision.europa.eu

(21)  Voir page 139 de la recommandation de l’ABE.

(22)  Voir page 139 de la recommandation de l’ABE.


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